C’est sympa de donner des nouvelles ! Alors qu’on se demande ce que sont devenus les membres des groupes de la scène punk mélo hexagonale des années 90 (tous disparus, les Shaggy Hound, les Six Pack, les Garlic Frog Diet, les Seven Hate, les Drive Blind… ?), on est toujours ravis de constater que certains résistent encore. Les Greedy Guts ont sorti leur album Songs & Bullets en 2008 et tournent dans toute la France ; un Bushmen s’éclate dans des remix à base de guitares (myspace.com/reallynodj). Et voilà qu’on apprend que Fabien Pichon, un ex Fake Hippy, fait une apparition inattendue au rayon littérature. Il signe un premier recueil de seize nouvelles de très bonne tenue : les grands espaces. Avec une maîtrise du détail quasi microscopique, une recherche du mot parfait qui tourne au trouble obsessionnel compulsif, il raconte des histoires toutes simples et touchantes, relate les états d’âme de personnages qui deviennent universels tant ils confinent à la banalité. Il manie l’ellipse avec désinvolture, écrit sans tout dire, laisse le lecteur se forger son opinion, et parfois inventer la fin de l’histoire. Une femme qui attend son mari dans une robe de soirée trop serrée, un petit garçon qui consigne les errances drolatiques d’un père alcoolique, un jeune homme qui rêve des plaines américaines et retrouvera le chemin du bled…toutes les situations sont emblématiques d’une société trop étriquée pour ses non-héros en quête de grands espaces. Le vocabulaire est précis et raffiné, la prosodie des phrases, alanguie, n’est jamais ni ennuyeuse ni déroutante. Seul bémol : espérons que la couverture tristounette et la faible distribution inhérente à l’éditeur, permettront à ce bouquin de trouver le public qu’il mérite.
Les grands espaces / Fabien Pichon. L’Harmattan, 2008
Chronique publiée dans Noise n°11 – été 2009