Lisa McInerney a su faire naître, en deux romans, une collection de personnages hallucinants, aussi déglingués qu’attachants, irrémédiablement liés les uns aux autres. Il faut dire que Cork est un petit monde où l’on se retrouve vite à patauger dans les mêmes eaux stagnantes. Dans Hérésies glorieuses, on faisait connaissance de Ryan, alors âgé de quinze ans, fils de Tony, prolétaire veuf qui le dérouillait allègrement. En quête d’argent facile, Ryan alimentait le quartier en drogues diverses, et semblait déterminé à étendre son petit trafic, malgré les craintes de Karine, son grand amour. Sa route allait croiser celle de Maureen, abandonnée à sa solitude dans un ancien bordel, qui demandait l’aide de son fils Jimmy, le caïd local, après une grosse bêtise. Que Jimmy allait réparer, secondé par Tony… Dans Miracles du sang, on les retrouve (quasiment) tous. Rien n’a changé (ou presque). Leur univers demeure, sclérosant, étouffant, comme Cork, comme l’Irlande. Car c’est bien une critique acerbe de l’Irlande contemporaine, campée sur ses contradictions, que dresse Lisa McInerney. La crise économique a fait du tigre celtique un animal mythique et disparu qui a dévoré ses enfants avant de s’éteindre. Les fantômes hantent toujours les maisons irlandaises, ceux des filles déchues condamnées aux travaux forcés dans des couvents glaciaux, ceux des fils qui suivent les mêmes mauvaises pentes que leurs pères. L’avenir semble sombre, le destin des héros tracé. Et pourtant… L’humour féroce sauve de la sinistrose et les hérétiques sont glorieux, en quête de rédemption. Tour à tour touchants, mesquins, grandioses, s’arrangeant de leurs imperfections ou dévorés de culpabilité. Y’aura-t-il un miracle pour eux ? Un troisième tome, à venir, nous le dira.

Certains de tes personnages de Hérésies glorieuses, ton premier roman, reviennent dans Miracles du sang. J’ai entendu dire que tu es en train d’écrire un troisième roman où les mêmes caractères sont toujours présents. Avais-tu décidé d’écrire une trilogie depuis le début, ou as-tu trouvé que tu avais encore des choses à dire sur eux au fur et à mesure de l’écriture ?
J’avais une vague idée, depuis le départ, que ça serait une trilogie, et que mes romans s’appuieraient plus ou moins sur la devise “Sex, Drugs and Rock ‘n’ Roll”. Ce qui signifie que mon troisième roman qui va suivre sera celui fondé sur le concept « Rock ‘n’ Roll ». J’avais la plupart des principaux personnages en tête depuis des années avant de commencer à écrire, alors je savais que ce qu’ils avaient à me dire ne tiendrait pas dans un seul livre. Et j’avais dans l’idée Miracles du sang avant Hérésies glorieuses. Tout ça est très confus dans mon esprit, j’ai du mal à reprendre le fil de ma pensée, à me rappeler quoi arrive à qui, et quand.
J’ai pensé à Irvine Welsh en lisant tes romans. Comme toi, il met en scène des losers flamboyants, dont il suit le parcours sur différents livres, dont il creuse l’environnement et le langage. Aimes-tu son travail ? Penses-tu que certains auteurs ont une influence sur ton œuvre ?
J’ai lu Trainspotting quand j’étais ado. Je ne pouvais pas croire ce que je lisais, y donner un sens. J’avais sous les yeux cette incroyable collection de personnages, sauvages, qui ne respectaient aucune règle… ça ne ressemblait à rien de ce que j’avais lu avant. Certaines images des romans de Welsh alors que je le découvrais pour la première fois à quinze ou seize ans m’ont tellement marquée que je m’en souviens encore, surtout des passages des chapitres « Mauvais sang » ou « manger dehors ». Découvrir des auteurs comme Irvine Welsh ou Pat McCabe quand j’étais adolescente a complètement changé ma façon d’envisager l’écriture, ça m’a ouvert les yeux sur comment un auteur pouvait, de multiples façons, tresser une histoire et manipuler le lecteur. C’est à cette période que j’ai été le plus perméable aux influences, je pense. Je ne crois pas que les auteurs que j’ai lus adulte ont eu le même effet sur moi ou sur ma manière d’appréhender l’écriture, sûrement parce que je suis évidemment plus sûre de mon propre style à présent.
Ton succès a été immédiat. Tu as remporté the Baileys women’s prize for fiction and le Desmond Elliott prize for Hérésies glorieuses. Ces récompenses ont-elles été pour toi un encouragement à continuer, ou au contraire, est-ce que ça t’a mis la pression ?
Les deux, vraiment. Considéré avec le recul, ça semble très encourageant, comme une preuve que j’allais dans la bonne direction, que j’étais faite pour l’écriture. Mais avant la publication de Miracles du sang, je me suis beaucoup inquiétée de savoir si ces prix voulaient dire que les gens attendaient un Hérésies 2, qu’ils ne voudraient pas lire un roman avec une tonalité différente, une intrigue plus resserrée. Puis Miracles du sang a été présélectionné pour le Dylan Thomas Prize et le Dublin Literary Award, et il a remporté le RSL Encore Award, alors je suppose que je n’avais aucune raison de tant m’en faire.
L’action se déroule à Cork. Tes personnages auraient-ils pu vivre ailleurs en Irlande ?
C’est une histoire très irlandaise, alors beaucoup des expériences que font les personnages pourraient arriver à n’importe qui dans n’importe quel coin du pays. Mais si l’on considère la taille de la communauté dont sont issus les personnages, les chances pour que les coïncidences qui font avancer le récit puissent se produire et ainsi de suite, Cork est la ville parfaite pour cette histoire. Les événements qui ont lieu dans Miracles du sang se déroulent dans un endroit où il y a un port, et où l’accès au marché noir irlandais se fait à partir de ce port, alors c’est définitivement Cork. Cork a une ambiance et un rythme très particuliers. C’est la deuxième ville de la République et elle agit comme le font toutes les villes de seconde importance, elle distille un mélange d’orgueil attachant et de complexe d’infériorité. Et la façon de parler des personnages est particulière à Cork. La façon dont on parle est tellement importante, le langage qu’on utilise définit notre manière d’envisager le monde. Les personnages sont « corkiens ». Ils ne seraient pas ce qu’ils sont s’ils venaient de n’importe où ailleurs. Ils ont grandi en utilisant cet accent différent, ce vocabulaire différent, cette manière différente d’expérimenter leur environnement, leur façon différente de penser à l’Irlande. Sans Cork, plus rien n’est pareil.
Considères-tu Cork comme le trou du cul de l’Irlande, comme s’intitulait ton blog ?
Pas du tout ! Au moment où je faisais mon blog, j’ai déménagé de l’ouest de l’Irlande à Cork, ce que tu pourrais considérer comme quitter le trou du cul de l’Irlande pour aller en ville. Ce qui est drôle, c’est que tout le monde en Irlande considère sa région comme la plus désavantagée, oubliée, incomprise. Alors n’importe qui peut venir du trou du cul du monde. C’est un état d’esprit, pas une situation géographique.
J’ai vu que tes romans, parce qu’ils sont très bons, ont été qualifiés de romans masculins. Ça a dû te mettre en colère, non ?
Ça m’a plus rendu perplexe que vraiment mise en colère. Ça ne m’agace plus, ni ne me perturbe plus, maintenant. Sûrement parce que j’y ai accordé tellement d’importance à l’époque de la sortie d’Hérésies que personne n’ose plus dire ça depuis ! Plus qu’autre chose, ça m’intriguait. Je crois que cette réflexion était due au fait qu’on est tellement habitués à ce que ce soit des hommes qui écrivent une littérature urbaine sans concession, pleine de sexe, de drogues, de crime, d’argot. Ou alors c’est parce que beaucoup de mes personnages sont des hommes. Par exemple, tout Miracles est raconté du seul point de vue de Ryan. Ou c’est peut-être parce qu’Hérésies glorieuses est indéniablement un roman sur l’état de notre pays, et que beaucoup de lecteurs et de critiques conservateurs pensent encore que les femmes écrivent des histoires centrées sur le foyer. Ou c’est peut-être parce que j’utilise beaucoup le terme « merde ». Qui sait ?
La construction narrative de tes romans est incroyable. Les personnages semblent aspirés dans une matrice qui les lie les uns aux autres. Comment procèdes-tu pour agencer les éléments de tes histoires ? Fais-tu un plan préalable très détaillé ?
Absolument pas ! Tout vient des personnages. Quand tu passes beaucoup de temps à apprendre à connaître un personnage dans ta tête, à le mettre dans telle situation ou le faire réagir à tel événement particulier, tu finis par facilement savoir où il s’intègrera dans son propre monde et avec qui il sera en relation. Quand j’ai commencé Hérésies glorieuses, avec pour point de départ Maureen qui venait de tuer accidentellement un homme, j’ai su immédiatement qu’elle était la mère de Jimmy, que Jimmy était le vieux pote de Tony, et que Tony était le père de Ryan. Quand un personnage s’assemble dans ma tête, je ne veux pas seulement savoir qui il est, mais aussi qui sont ses parents, de qui il est amoureux, avec qui il est ami, et ainsi de suite. Ensuite, ces personnages deviennent une énigme pour moi. Donc la façon dont ils sont connectés fait partie de la construction même de leur univers. Je sais comment l’action d’un personnage affectera la vie d’un autre, je me demande ensuite comment réagira ce second personnage, et ce que cela aura comme conséquence dans leur monde. Tout cela est très organique, vraiment. Je place le personnage dans une situation face à laquelle il doit réagir, puis je le suis.
J’adore les titres de tes romans. Ils sont paradoxaux, ambigus envers la religion, énigmatiques. Qu’as-tu voulu exprimer à travers eux ? Peut-on savoir comment s’appellera le troisième ?
Je n’ai décidé du titre Hérésies glorieuses qu’au tout dernier moment. Pendant longtemps, je ne suis pas arrivée à trouver le bon titre, rien qui parvenait à englober tout ce que je voulais dire et qui exprimait la diversité de la vie contenue dans le livre. Puis, à la fin, ça m’est venu. C’est une variante à partir des glorieux mystères du rosaire, qui est une prière importante dans la tradition mariale catholique. Le catholicisme imprègne tellement toute la vie courante en Irlande, qu’on y croit encore ou pas. C’est constitutif du tissu même du pays. C’était cohérent de corrompre un sentiment religieux pour le titre, car c’est principalement de ce dont traite le roman. J’ai voulu poursuivre sur cette idée pour le deuxième. Miracles du sang est une référence au miracle du sang de San Gennaro à Naples, la ville dont la mère de Ryan est originaire. Le sang de Ryan – ce mélange de sang irlandais et italien – le plonge dans les embrouilles ou le tire d’affaires à maintes reprises au cours de l’histoire. Quant au titre du troisième, je n’en dirai rien. Je discute toujours des titres avec mon éditeur, donc jusqu’à ce qu’il me dise qu’il en est content, je ne dirai à personne ce que j’ai en tête. Mais il va bien avec les autres !
Depuis la France, il semblerait que l’Irlande est en train de profondément changer, et que ces changements sont issus de la volonté du peuple. Je pense au droit à l’avortement, au mariage gay, à la fin de la pénalisation du blasphème. Est-ce que ce sont des signes du déclin du poids de la religion catholique sur la vie des gens, et surtout sur la vie des femmes ?
Oui, bien sûr. En vérité, l’autorité de l’Eglise catholique était en déclin depuis des années, mais elle s’est effondrée dans les années 90, suite aux scandales des abus sexuels sur les enfants, ceux concernant la maltraitance des femmes dans les blanchisseries Magdalene, ceux dans les écoles techniques, la dissimulation des crimes commis par des membres de l’Eglise, et j’en passe. Comment quiconque peut espérer tirer une orientation morale et spirituelle d’une telle organisation ? Les rituels demeurent : beaucoup de couples irlandais continuent à se marier à l’Eglise et à faire baptiser leurs enfants, par exemple. Et c’est inscrit dans notre langue. En Irlandais, pour dire bonjour, on dit ‘Dia duit’, « que Dieu soit avec toi », et pour répondre, on dit ‘Dia is Muire duit’, « que Dieu et Marie soient avec toi ! »
Mais la fréquentation de la Messe a baissé de façon spectaculaire, et les Irlandais ne sont plus intéressés par ce que le Vatican a à dire à propos de la reproduction, du mariage et des droits LGBT. Les referendums sur le mariage gay ou l’avortement ont tous les deux remportés une victoire écrasante. Les militants de terrain ont fait campagne contre la fortune et l’influence de l’Eglise catholique et les lobbys américains pro-life, et ils ont gagné. Catégoriquement. Je ne crois pas que les Irlandais veuillent encore qu’on leur dise comment se comporter. On a eu notre dose.
Penses-tu que ce qui arrive à Maureen (on lui enlève son enfant car elle est mère célibataire et on l’envoie à Londres), ou les horreurs subies par les filles Magdalene font partie de l’Histoire irlandaise à présent, que les hommes et les femmes sont enfin égaux ?
On a fait du chemin. Il y a encore des choses à améliorer pour chacun d’entre nous, sans prendre le genre en considération. Des services de garderie abordables, de meilleurs congés maternité et paternité, un meilleur soutien aux familles monoparentales, surtout en termes de logement et d’assistance pour les parents seuls avec enfants. Une plus grande attention dans ces domaines nous aidera à parvenir à une vraie égalité. Une meilleure éducation sexuelle, incluant la notion de consentement et les questions LGBT. Plus d’aides pour les victimes de violence sexuelle et conjugale, un plus grand nombre de condamnations et travailler à ce que les gens aient une plus grande confiance en notre système légal quand ils viennent déposer plainte pour agression, maltraitance ou viol. Mais dans ces domaines, tous les pays doivent s’améliorer, pas seulement l’Irlande. On s’en sort bien. Le temps est loin où l’on enfermait les femmes « déchues » et où les évêques disaient aux hommes qu’ils avaient autorité sur le corps de leurs épouses. Il faut juste qu’on continue dans cette voie.
Dans tes romans, les filles (Karin et Natalie) s’en sortent mieux que les garçons. Est-ce uniquement dû au fait qu’elles proviennent d’un milieu plus favorisé ?
Plutôt, oui. Karine vient du même coin de Cork que Ryan, mais elle a des parents qui la soutiennent, qui sont déterminés à ce que tout aille bien pour elle. Natalie vient d’un quartier de classe moyenne, et ses parents espèrent qu’elle réussisse. Pourtant, elle n’est pas ce qu’on pourrait appeler une bonne personne. Natalie s’en tire mieux que Ryan en termes d’études et de perspectives, mais je pense qu’il est plus gentil qu’elle, au fond.
Mais, bien sûr, il y a le contexte lié aux différences entre les sexes qui joue. Même si Karine n’avait pas eu de parents aussi attentifs, elle n’aurait probablement pas commencé à vendre de la drogue, comme son petit ami l’a fait. En tant que fille, elle n’aurait certainement pas été encouragée à tenter sa chance dans un milieu aussi dangereux. En tant que garçon, on attend de lui qu’il affronte les embrouilles dans lesquelles il s’est empêtré lui-même. On rejette plus vite les ados perturbés quand ce sont des garçons, je pense. C’est pourquoi tous les gens pour et avec qui Ryan travaille sont des hommes.
Considères-tu que Ryan est une victime ?
ça, c’est dur, comme question ! Sa mère est morte quand il avait onze ans, et il entretient une relation difficile avec son père alcoolique. Il a commencé à dealer de la drogue quand il avait seulement quatorze ans, alors est-ce que ce serait juste d’affirmer qu’il était capable de comprendre dans quoi il se fourrait, qu’il y consentait ? Légalement, il était trop jeune pour quitter l’école, quitter son foyer, avoir des relations sexuelles, boire, fumer, voter ou travailler. On peut trouver qu’en vieillissant il devrait être capable de comprendre qu’il a fait les mauvais choix, qui lui ont fait du mal, ainsi qu’à ceux qu’il aime, à sa communauté, à son pays. Au début de Miracles du sang, il a vingt ans, il est légalement adulte. Mais est-ce que ça aurait été si facile pour lui de tourner le dos à son business et à ceux avec lesquels ils bossaient ? Ce n’est pas comme s’il avait pu demander des indemnités de licenciement. Je n’aime pas dire au lecteur quoi penser de Ryan : c’est à eux de décider, il y en a plein qui l’aiment et d’autres qui le trouvent affreux! Soit votre coeur est assez grand pour lui pardonner, soit non.
Ne fait-il pas aussi des erreurs parce qu’il ne sait pas dire « je t’aime », qu’il n’a pas les mots pour exprimer ses sentiments ?
Mais il a les mots ! Il a même les mots dans plusieurs langues. Il a du mal à dire à Karine qu’il l’aime quand il a quinze ans, mais quel gamin de quinze ans n’aurait pas du mal avec ça ? Ensuite, il n’a aucun problème à lui dire qu’il l’aime. Je dirais même qu’il a plutôt le problème inverse : il dit facilement les choses, c’est beaucoup plus dur pour lui de passer des paroles à l’action. Non pas qu’il soit un menteur impénitent, mais pour lui les mots n’ont pas de valeur. En ce qui concerne sa relation avec son père, je ne crois qu’ils se sont dits qu’ils s’aimaient depuis que Ryan est tout petit. Mais ce n’est pas inhabituel en Irlande. Les garçons, surtout dans les milieux populaires, sont encouragés à contrôler leurs émotions, à cacher leur vulnérabilité.
Maureen possède un fantastique sens de la répartie. Son sens de l’humour n’est-il pas très irlandais ?
C’est ce que j’ai toujours dit, mais finalement je pense que l’humour, dans n’importe quelle culture, a les mêmes fondations. L’Irlande n’est certainement pas le seul pays à avoir un penchant pour l’humour noir. Cela dit, Maureen a évidemment une façon de parler très irlandaise. Notre dialecte de l’anglais, cet hiberno-anglais, se distingue par sa fantaisie et sa faconde. Nous sommes des conteurs, on aime bien enjoliver la réalité, et l’esprit l’emporte souvent sur la vérité. Provoquer une forte réaction avec des mots, c’est ce qui compte. Maureen possède toutes ces qualités. Elle est « pure cute », ce qui ne veut pas dire adorable en Irlande, mais extrêmement futée.
Alcoolisme, pauvreté, violence, poids des traditions familiales et religieuses… Peut-on voir ton travail comme une nouvelle exploration des thèmes classiques de la littérature irlandaise ?
Je ne sais pas, mais je ne me plaindrai pas si tu le dis ! Mais bon, ce sont des thèmes universaux, non ?
Crains-tu les conséquences que pourrait avoir le Brexit sur l’Irlande ?
Naturellement. C’est un véritable désastre, un choix mal avisé, hypocrite, mis en oeuvre par des idiots. L’Irlande est le seul pays de l’Union Européenne à avoir une frontière terrestre avec le Royaume-Uni, un fait qu’apparemment ils avaient oublié jusqu’au lendemain du vote. En plus de ça, l’Irlande du Nord n’est pas seulement une circonscription du Royaume-Uni, c’est aussi une partie de l’Irlande, et sa population a le droit, légalement, de se déclarer Irlandaise et de posséder un passeport irlandais si elle en fait le choix. La République a donc la même responsabilité envers le peuple du Nord. Nos peuples sont liés, nos cultures sont liées, nos économies sont liées, nous dépendons les uns des autres et on ne peut pas nous séparer sans créer d’immenses dégâts. Le Brexit menace d’anéantir tout ce que les générations et les gouvernements précédents ont eu tant de mal à construire, et le gouvernement anglais s’en fout complètement.
Tes romans sont-ils des cris de haine ou d’amour envers l’Irlande ?
D’amour. Toujours d’amour. Tu peux aimer ton pays et pourtant en voir ses défauts. En fait, si tu ne vois pas ses défauts, peux-tu réellement prétendre aimer ton pays ?
Interview publiée dans New Noise n°49 – été 2019